Un peu d'histoire monétaire...                                               

                                                                                    D'après le livre de Brenda Ralph Lewis

  • Histoire de la monnaie en général
    L'apparition du troc survint chez les hommes en même temps que le sédentarisme. Avec ce nouveau mode de vie, les hommes commencent une division du travail qui nécessitait le troc [ je produis telle chose et je l'échange contre telle autre chose que je ne sais pas produire]. Au début, les échanges portaient sur le bétail, des peaux de bêtes ou encore de la nourriture. C'est peut-être pourquoi, selon l'étymologie, le mot salaire viendrait du latin sal [sel, qui constituait parfois la solde des soldats romains]. Puis des règles strictes concernant l'échange des biens sont mises rapidement au point. Progressivement, on confère une valeur standard à un objet, par rapport aux autres. On pouvait échanger dans certains coins du globe des marchandises grâce au poids en métaux lourds (Mésopotamie), à des briques de thé séché(Tibet) ou même des pommes de terre (île Tristan da Cunha).

        La monnaie moderne telle que nous la connaissons aujourd'hui apparaît en Grèce vers l'an 650 avant JC (Lydie). Mais c'étaient des simples pièces d'or et d'argent frappées dans le métal et l'émission de ces monnaies était strictement privée. La première émission de monnaie organisée par un Etat le fut par l'Empire d'Alexandre le Grand. A sa mort, ses généraux se sont partagés son empire, se partageant également le droit de frapper des pièces. Les Romains comme les Byzantins vinrent ensuite et frappèrent un très grand nombre de pièces telles les aureus

 

  •    Les billets apparaissent presque en même temps que les pièces mais leur utilisation se répandit beaucoup plus lentement. Le tout premier est apparu en Chine en 860 avant JC mais les plus célèbres ne furent imprimés qu'entre 1368 et 1399, c'est-à-dire l'époque où la dynastie Ming régnait sur l'Empire du Milieu. Ces billets-là étaient imprimés sur de l'écorce de mûrier. Mais les premiers billets ne rencontrèrent pas de succès car l'inflation existait déjà et les guerres faisaient perdre toute valeur à ces "chiffons de papier". Les pièces en métaux restaient une valeure sûre par rapport à du vulgaire papier. Un bon demi millénaire après, le premier billet européen fut imprimé à Stockholm en 1661 (appelés alors les dalers). Les billets ne furent imprimés de manière permanente qu'en 1694, date à laquelle la Banque d'Angleterre fut fondée pour financer une guerre. Bien que le principe de ces billets était une reconnaissance de dette anonyme (au porteur) faite par la Banque, ceux-ci circulaient comme moyen de paiement.

        La première expérience des billets que connut la France fut celle de la Banque de Law. Law était un financier écossais installé en France et celui-ci inventa un système financier en 1716. Il crée la Banque Générale et devient ministre des finances. Cette banque était chargée d'avancer à l'Etat les recettes fiscales et en échange, elle percevait les impôts. Son financement se faisait par émission de titres au porteur. Ca marchait d'abord très bien puis les rentrées d'argent devinrent insuffisantes. Law avait investi dans la Compagnie des Indes Occidentales(chargée de l'exploitation des colonies) mais celle ci s'avère moins rentable que prévu. Le système s'effrondre avec une panique en 1720, il n'aura duré que 3 ans.

 

  • Les billets

    Cette expérience et celle des assignats (émission pendant la Révolution de 1789 de billets gagés sur les biens du Clergé ou des Biens Nationaux mais qui connurent une dépréciation galopante du fait de l'instabilité politique) montrèrent les méfaits (apparents) de l'inflation et provoquèrent un débat récurrent en Grande-Bretagne. Les tenants du Banking School s'opposaient aux supporters du Currency School. Les premiers défendaient un lien entre l'activité économique et l'émission de monnaie (plus il y a de monnaie en circulation, mieux l'économie se porte) tandis que les tenants du Currency Principle (dont l'économiste libéral David Ricardo) exigeaient un lien strict entre l'émission de monnaie et le stock d'or, afin de garantir la valeur de la monnaie. Ce sont ces derniers qui l'emportèrent avec la promulgation de la Peel Act en 1844 qui réglemente strictement le fonctionnement de la Banque d'Angleterre. La Banque ne peut émettre des billets qu'en contrepartie d'un équivalent en or. C'est pourquoi la livre acquit un rayonnement international.

    Parallèlement à la stricte émission des monnaies garanties en or, se dévellope un système monétaire international basé sur l'or. Comme les monnaies sont convertibles en or, pourquoi ne pas échanger les monnaies par rapport à l'or? Ainsi le système monétaire du 19e siècle s'est révélé relativement stable, comme le montre la valeur du Franc Germinal qui n'a pas fluctué par rapport à l'or entre avril 1803 et août 1914 (soit plus d'un siècle!).

    La Grande Guerre de 1914-1918 remit en question toute cette belle organisation monétaire. Pour financer la guerre, les Etats eurent recours à la planche à billets ainsi qu'u cours forcé des billets. Cela créa la première vague d'inflation moderne. Le système basé sur l'or ne pouvait plus marcher car le montant de l'or ne couvrait même pas le dixième des billets en circulation. Il fallut s'en remettre aux taux de changes fixes. C'est alors que survint la première grande hyperinflation de l'histoire en Allemagne : en janvier 1923, le président du Conseil français, Poincaré fit occuper la Ruhr pour obliger l'Allemagne à payer ses réparations de guerre (l'amende était très salée :3 ans de PIB allemand!). Pour rembourser la France, les dirigeants allemands laissèrent l'inflation filer : les billets en monnaie de singe remboursaient ainsi la dette. Le mark a ainsi perdu près de 8,5 milliards de fois sa valeur entre 1922 et novembre 1923. Les gens prenaient tellement peur de la monnaie que quand ils recevaient leur salaire du jour, ils partaient aussitôt le dépenser dans les restaurants ou dans la nourriture non périssable, afin de perdre le moins de pouvoir d'achat possible. C'est pourquoi les Allemands d'aujourd'hui ont une peur si bleue de l'inflation. Cela explique leur acharnement à imposer le plus de rigueur possible.

50000 MarksVoilà qui illustre un peu l'hyperinflation que connut l'Allemagne. Le billet de 50.000 Marks a été émis le 9 août 1923 avec une série de billets d'autres valeurs. Il a été ensuite remplacé par une nouvelle série de billets le 22 août 1923 dont le billet vert de 10 millions de marks. Cette série est elle même remplacée par une nouvelle série pour suivre l'évolution des prix : c'est la série du 1er septembre 1923(exemple du 500 millions de marks). Bien sûr, la Reichsbank devait imprimer sans cesse de nouveaux billets tous les jours...

 

 

wpe52961.gif (257496 octets)                  wpe90013.gif (311286 octets)